choc

  • Le choc de l'Humanité

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    Céleste 1 - Acrylique sur carton toilé - 47x37

    Vendredi 21 juillet 2017

    Choqué.

    Il est 7h du matin et, comme tous les matins, j’ouvre mon ordinateur et télécharge les mails de la nuit. Parmi ceux-ci, Le Quotidien du Médecin, la seule publication liée à ma vie professionnelle antérieure et à laquelle je reste abonné.

    « Décès du Pr Christophe Mariette ». Le nom de ce médecin lillois me rappelle le souvenir d’un TAP (Tiré à Part) portant ce nom. Il me ramène 15 ou 20 ans en arrière, à l’époque où j’étais responsable de l’administration de la visite médicale dans un laboratoire pharmaceutique. Mon équipe était chargée d’envoyer aux délégués médicaux la « littérature » utilisée pour soutenir leur discours d’information auprès des médecins.

    L’article montre une photo du Pr Mariette, plutôt jeune. Il était un spécialiste mondialement reconnu en chirurgie et cancérologie digestive. L’émoi provoqué par sa disparition est immense. De quoi est-il mort ? L’article ne le mentionne pas. J’ai la curiosité de vouloir savoir comment il est mort prématurément, à 48 ans. Généralement, une phrase, faisant par exemple référence à une « longue maladie », permet de comprendre la cause du décès. Mais là : rien !

    Je cherche un autre article où l’information pourrait être présente. Tous les organes de presse diffusent exactement le même communiqué citant l’homme et son parcours, mais toujours rien sur l’origine de sa mort. Cela finit par être suspect…

    C’est finalement sur le site de la Société Nationale Française de Gastro-Entérologie (SNFGE) que je lis la stupeur avec laquelle ses parents, amis et collègues ont appris que le médecin s’était donné la mort. L’émotion m’étreint. Il semble y avoir un immense décalage entre l’image que donnait cet homme, « brillant esprit, d'une intelligence aiguë, travailleur acharné, rigoureux et charismatique » et ce qu’il devait vivre intérieurement.

    Le déchirement qui va au-delà du supportable, la conscience de l’acte inévitable et fatal me touchent profondément. Ils me rappellent la fragilité de l’homme et me renvoient l’image de l’Humanité avec un grand « H ». Tel un fil d’Ariane, cette réflexion m’amène à la définition que donne Olivier Wahl de l’Art : « c’est ce qui donne l’image de ce que c’est qu’être humain ».

    L’Art, la conscience de l’acte ultime, la mort, le bouleversement qu’elle provoque… L’Humanité est le trait d’union de tout cela. J’absorbe le choc. Il diffuse en moi une onde à l’écho sourd et profond. Le Professeur Mariette eût été malade, l’émoi aurait été différent, le choc moins violent. Le résultat ne change rien ; c’est l’acte qui bouleverse.

    L’article sur le site de la SNFGE se termine de façon douce et poétique, tranchant avec la stupeur et la violence ressenties jusqu’ici : « Christophe est maintenant dans le ciel avec les étoiles filantes ». Je ne connaissais pas cet homme mais une chose est sûre : par l’émotion ressentie, je ne l’oublierai pas.