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L'ancien blog comportant les articles d'octobre 2011 à juin 2014 n'est malheureusement plus accessible.

Je vais le reconstituer peu à peu sur le présent site.

  • The Voice & The Paint - saison 6

     

    Defi d artistes echo 3

    Défi d'Artistes - Echo 3 - Acrylique sur toile - 100x30 - 2017

    L'année dernière à la même époque, je publiais un article intitulé "The Paint - saison 5".

    J'y faisais un parallèle entre mon parcours d'artiste et ce que je ressentais depuis 2012 en regardant l'émission "The Voice", télécrochet annuel destiné à révéler les talents de chanteurs émergents. Sa particularité est que la sélection des candidats se fait à l'aveugle, les coaches tournant le dos aux candidats et ne jugeant ainsi que la voix.

    L'arrivée de la saison 6 sonne l'heure de ce rendez-vous qui, chaque année, me fait ressentir des émotions identiques mais des sensations différentes. Parce que ni moi, ni les Voix qui se présentent, ni les coaches ne sommes les mêmes. Il n'y a pas de routine qui s'installe et qui fait que cette année ou cette saison ressemble aux précédentes.

    Que s'est-il passé pour moi depuis mon article et comment réagit le Denis d'aujourd'hui face à cette nouvelle saison de "The Voice" ?

    Je terminais mon précédent article (The Paint - saison 5) en confiant préparer un objectif ambitieux. Il s'agissait de présenter ma candidature pour exposer aux Salons MacParis et Réalités Nouvelles 2016. Fin du suspense : mon dossier n'a été retenu ni pour l'un, ni pour l'autre. Je pensais que la concurrence était la principale (la seule ?) raison de ce refus. J'ai pris conscience qu'un autre critère entre en compte : la durée. Avant d'accueillir un jeune artiste, l'organisation d'évènements aussi sollicités veut probablement s'assurer qu'il "tient la route", surtout si cette jeunesse vient au moment où l'âge dudit artiste frôle celui de la retraite. Ne s'agit-il pas d'une lubie de senior qui cherche à occuper ses mains et son cerveau ?

    Les coaches de "The Voice" ont la la même préoccupation : sélectionner des voix qui dureront et qui, derrière une faille ou une imperfection, cachent un potentiel à développer, un mystère à découvrir, un diamant à façonner pour lui donner l'éclat qu'il mérite.

    Une voix parfaite ou déjà entendue ne les intéresse pas. Pendant les auditions à l'aveugle, ils cherchent un étonnement, un trouble qui leur donne envie d'en savoir plus. La qualité des prestations est désormais si élevée qu'il est rare qu'aucun fauteuil rouge ne se retourne. Qu'en est-il pour moi, jeune peintre qui se présente aux portes du marché de l'art, tentant de faire v(al)oir ce que je fais auprès d'un public qui peine à s'élargir ?

    Au début, ils chantaient dans leur chambre et je peignais dans ma salle à manger. Nos parents et amis sont devenus nos premiers spectateurs et nous ont encouragés à poursuivre. Nous avons ensuite tenté de nous rendre crédible pour percer au delà de ce cercle indispensable et bienveillant. Les fidèles sont restés inconditionnels et présents. Beaucoup d'autres spectateurs enthousiastes de la première heure ne se manifestent plus, l'attrait de la nouveauté ayant disparu. La durée de ce parcours vite exprimé se compte le plus souvent en années. C'est ce que l'on entend du récit que font la plupart des candidats lorsque, sélectionnés, ils disent qui ils sont et pourquoi ils sont là.

    "Ce que vous faites a déjà été vu cent fois !" Cette sentence, entendue récemment à propos de ma peinture, est sans appel. Pourtant rien n'est copié, tout est sincère et authentique. Lorsque j'ai produit mon premier "Geste coloré", je n'avais aucune idée de ce qu'était l'art abstrait ! Georges Matthieu et l'Abstraction Lyrique m'étaient totalement étrangers. J'ai probablement eu la même pulsion libératrice que ces artistes qui ont voulu dans les années 50 s'affranchir des codes et contraintes imposés pendant le second conflit mondial. Ce que je fais n'est pas nouveau. Si je veux être remarqué, je dois proposer autre chose que ma peinture. Ma prestation doit être en phase avec cette fameuse surprise attendue par les coaches.

    Je prends conscience, en écrivant ces lignes, que les années précédentes j'essayais de comprendre ce qui provoquait chez les coaches l'envie de se retourner. Au fil des émissions et des saisons, j'ai perçu ce qui les faisait ou non réagir. Avec cette sixième édition, je me sens davantage sur scène et non dans le fauteuil plus confortable et moins risqué de juge.

    La question n'est plus "ce que je présente va-t-il susciter l'étonnement ?" mais plutôt "qui suis-je pour les juges ? Qui vais-je présenter d'unique,  d'authentique et qui les touche ?". Les candidats, le plus souvent âgés de 16 à 40 ans, ont chacun une histoire. Ils sont sur scène parce qu'ils sentent que c'est leur place dans ce monde. Ils n'ont qu'une chance d'être sélectionnés : être eux-même, que leur voix parle d'eux, qu'elle donne des indices sur qui ils sont, qu'elle révèle des failles et des imperfections dans lesquelles les coaches et le public pourront trouver de l'humain. La perfection engendre l'admiration et la fascination... mais pas l'émotion. Et l'Art, comme la vie, est en relation intime et permanente avec l'émotion.

    Où est mon terrain, où est la scène sur laquelle j'ai une place évidente ? Y fais-je de la peinture, de l'écriture ou autre chose ? Une émission télévisée surmédiatisée et bien orchestrée peut divertir... mais aussi amener à des questions existencielles !

  • Le luxe de l'insouciance

    Diamant mandarin

    Diamant mandarin - gouache sur papier - janvier 2011

    « Apprendre à observer et maîtriser les techniques de manière à pouvoir entamer dans de bonnes conditions une recherche personnelle créative et pertinente. Savoir utiliser la technique comme un outil au service de sa sensibilité et de sa créativité et non comme une finalité ». Tel est l’objectif précisé dans la Convention de Formation Professionnelle intitulée « Formation dessin, graphisme et couleur, peinture acrylique » que j’ai signée dans le cadre de mon DIF. Même s’il s’agit d’une formation « professionnelle » (DIF oblige), il n’est pas question pour moi de la transformer en projet professionnel.

    Je débute le 13 septembre, à la fréquence d’une séance hebdomadaire de trois heures, le lundi après-midi. Je retrouve dans l’organisation proposée par l’atelier ce que j’avais apprécié lors des séances de peinture vécues en entreprise : Delphine accompagne ses élèves à leur rythme. Pas d’objectif à réaliser, pas de validation d’acquis. Les étapes sont définies en fonction des progrès, des sensations et des envies. Cette situation est nouvelle pour moi. Jusqu’ici, j’ai toujours mis dans ce que j’ai entrepris un objectif à atteindre ou un résultat à obtenir.

    Quand j’étais Scout, dans les années 60-70, le diplôme avait la forme des badges et insignes qui font la fierté du Louveteau qui les a obtenus, par son habileté et son courage, et l’admiration de celui qui n’a pas encore fait sa Promesse. J’avais pu en glaner quelques-uns mais mon rêve était qu’ils recouvrent la manche gauche de mon pull marine, comme c’était le cas pour ceux que je considérais comme des « costauds ».

    À la même époque, j’avais fait du judo, sans grande motivation. Ce sport était censé développer la force et la maîtrise de soi. J’y voyais surtout la possibilité d’apprendre à me défendre. Pour ce faire, il fallait être mis en situation, c’est-à-dire… se faire attaquer, ce que je redoutais. Chuter, faire chuter, ce n’était pas ma tasse de thé. Et puis je n’aimais pas l’odeur du tatami sur lequel j’avais trop souvent le nez collé. Pourtant je m’efforçais de le faire correctement pour obtenir, avec fierté mais sans conviction, les ceintures jaunes, oranges puis vertes. Plus on grimpait dans l’échelle des ceintures, plus les combats étaient rudes et les affrontements pénibles.

    En 1970, je me suis essayé au sport d’équipe avec le hand-ball. Un copain de lycée, François B.,  m’avait proposé de le rejoindre dans son club. Il faisait figure de rebelle dans la classe, n’ayant peur de rien et surtout pas de l’autorité. Il jouait de la clarinette et sa mère était directrice de casting dans une agence de pub, ce qui m’avait permis de faire un essai devant la caméra pour une pub qui n’a jamais vu le jour. Sur une photo du tournage, je me souviens regarder François avec un air complice, chacun de nous ayant un gros cigare à la main. Le côtoyer c’était créer la possibilité du transgressif et de l’interdit. Faire du hand-ball avec lui c’était entrer dans son cercle et prendre une part de cette rébellion qui me fascinait. Sur le terrain, François était un avant-centre perceur de défense, et moi je n’ai jamais marqué un but. Sans cette consécration, je n’existais pas. Lors des matches, j’étais plus souvent sur le banc que sur le terrain. Mon engagement n’a duré qu’une saison et j’ai considéré que les sports collectifs n’étaient pas faits pour moi.

    Je suis arrivé à l’escalade deux ans plus tard, à seize ans, en répondant à la sollicitation d’un camarade qui m’avait proposé de rejoindre en vélo la maison familiale dans les Alpes. Nous nous sommes entraînés dans la forêt de Fontainebleau où il pratiquait régulièrement la varappe. J’ai été convaincu par cet exercice entre terre et ciel, défi lancé à la gravité. En escalade, les difficultés sont évaluées au moyen d’une cotation qui va de F (facile) à ABO (abominable). En gravir les échelons était un but et, même si rien ne m’obligeait à le faire, je mettais toujours la barre plus haut, la sanction de la chute me permettant d’évaluer si j’étais ou non au niveau.

    En pratiquant ces activités, il y avait toujours pour moi un objectif précis. Si je n’y arrivais pas, si je ne décrochais pas le Graal, je n’étais pas bon, pas à la hauteur. Aujourd’hui, j’ai peu de repères avec la peinture et le dessin. Ma seule motivation est d’apprendre. Quarante années sont passées et j’ai moins besoin qu’autrefois de prouver aux autres que « je suis capable ». Tout se passe entre moi et moi. Plus de chef de patrouille à qui obéir, plus de prof de sport qui sanctionne, plus d’entraîneur qui sélectionne. C’est jouissif de pouvoir arriver aller en cours sans devoir justifier d’un travail accompli. Le travail n’est pas un problème mais, pour la première fois de ma vie, je me sens libre de faire ou de ne pas faire. Avec cette formation, je découvre le luxe de l’insouciance. C’est bon la légèreté !

    Le lundi 13 septembre 2010, jour de mon premier cours, je me sens comme un premier jour d’école : un peu d’administratif, une liste de matériel à acheter et une entrée en matière ludique. J’entre dans le vif du sujet avec une nature morte à dessiner au crayon noir. Rapidement, je passe du ludique au problématique. Je n’arrive pas à reproduire avec précision ce que je vois. Dire que le dessin est imprécis est un euphémisme. Delphine a l’œil aiguisé pour repérer quand un élève est en difficulté. Mais, en bon professeur et en pratiquante assidue du croquis, elle sait que sans se trouver confronté aux problèmes de la perspective et des proportions, de la lumière et de l’ombre, du choix de l’outil et du support adéquats, l’élève n’a aucune chance de parvenir à l’autonomie et l’enseignement du professeur de s’ancrer sur du vécu.

    Beaute coloree pastel br

    Beauté colorée – pastel - mars 2011

     

    Toujours bienveillante, jamais complaisante. Ces qualificatifs traduisent la façon dont je vis l’accompagnement de Delphine. Nous ne restons pas plus de deux ou trois séances sur un media : après le crayon à mine de graphite et les natures mortes simples (un pot, une cruche, un fruit), je travaille l’encre de chine avec des outils divers (pinceau, plume, bambou taillé ou calame) pour des modèles plus complexes (batteur à œufs, mini cactus et « Chucky », l’ours en peluche). Les 3 heures passées en atelier ne rassasient pas mon envie d’apprendre, à moins que ce ne soit mon besoin de réussir. Les outils, comme les modèles, sont simples, facilement transportables. Tout objet devient matière à dessin, prétexte à dessiner : à la maison, ce sont la table à repasser, la souris de mon ordinateur, un téléphone portable et les verres.

     J’aime tracer l’ovale de la partie supérieure d’un verre. Je trouve ce mouvement agréable à faire. Je détecte en écrivant ces lignes que si l’ovale me plaît c’est parce qu’il supporte l’imprécision. Un rond, s’il n’est pas parfait, n’en est plus un. Une ligne droite ne mérite pas ce qualificatif si elle n’est absolument rectiligne. Dans ces deux exemples, la moindre imperfection se sent si elle ne se voit pas. Avec l’ovale, je trouve que c’est supportable. Ça permet de travailler avec moins de pression. Dessiner des verres à eau, des verres à pied, des bouteilles est un de mes défis favoris.

    Après l’exploration du crayon noir et de l’encre, je termine le dernier trimestre 2010 avec de la couleur : les crayons, puis le pastel et, enfin, la peinture avec la gouache. Aux natures mortes viennent s’ajouter les portraits et les animaux. Je travaille aussi les drapés.

    Chaque séance est l’opportunité d’un challenge dans lequel je m’investis à fond, en quête de l’approbation de Delphine, toujours encourageante, distillant des conseils pertinents au moment opportun.

    Je garde de cette période septembre-décembre 2010 un souvenir joyeux. Ma préoccupation de trouver une activité professionnelle reste présente mais passe au second plan. Le présent est occupé à mettre en pratique les enseignements reçus à l’atelier. Qu’il fasse beau, qu’il pleuve ou qu’il vente, je savoure sur mon vélo les 15 kilomètres que je parcours chaque semaine pour rejoindre Chelles d’où je repars à chaque fois avec la satisfaction d’avoir appris quelque chose de nouveau et qui renforce ma confiance en ma capacité d’avancer.

    Rien n’est simple mais j’ai le goût de l’effort, alors tout va bien ! Je jouis de ma situation comme je n’ai pas le souvenir de l’avoir déjà vécu.

  • Le jour du déclic

    Lundi 30 août 2010. Je suis en congés depuis… 3 mois. Nous sommes en fin d’été et, ce matin, je n’ai pas repris le travail comme ce fut le cas ces 32 dernières années. Et pour cause : c’est aujourd’hui le dernier jour de mon préavis de licenciement.

    Je suis inclus dans ce que l’on appelle un PSE : Plan de Sauvegarde de l’Emploi, ce qui signifie paradoxalement que je perds le mien. L’environnement économique dans lequel évolue l’entreprise qui m’employait a imposé la suppression de plusieurs centaines de postes. Jusqu’ici, j’ai traversé sept PSE et c’est le troisième dans lequel mon poste est supprimé. Par deux fois, j’avais pu me repositionner dans l’entreprise à un poste qui correspondait à ce que je savais et voulais faire.
     
    Là, c’est différent. Mon poste est une nouvelle fois supprimé mais il n’y a pas dans le nouvel organigramme de place qui corresponde à mes compétences. Au sein de la Division des Ventes, j’étais depuis 25 ans un « homme de l’ombre », de ceux qui sont là pour mettre de l’huile dans les rouages, qui font tout pour que ce qui est indispensable et qui paraît techniquement impossible trouve une solution. Je suis un généraliste, qui connaît les rouages de l’entreprise, qui sait toujours trouver la bonne personne au bon moment et qui a pris avec lui une rallonge électrique ou un couteau suisse quand personne n’avait imaginé en avoir besoin.
     
    Un de mes patrons, à qui j’avais posé la question « comment me vois-tu dans l’entreprise ? », avait répondu « comme un problem solver ». Et ce monde qui fonctionne à court terme n’a plus besoin de ces profils qui créent du lien dans l’entreprise. Chacun sa spécialité, sa mission et ses responsabilités. Le lien informatique fera le reste.
     
    La pré-retraite représente pour beaucoup une fabuleuse opportunité donnant à celui qui y a droit la possibilité d’être payé (par l’entreprise) jusqu’à la retraite sans avoir à y travailler. Il me manque 45 jours pour y avoir accès. Le commentaire que j’entends le plus souvent est que je devrais faire un procès à mes parents pour ne pas m’avoir conçu sept semaines plus tôt. Je sais depuis plusieurs mois que je ne peux y prétendre et ça ne sert à rien de s’apitoyer sur mon sort, même si ceux à qui je le dis paraissent désolés pour moi.
     
    Mes vingt-cinq ans d’ancienneté me permettent de partir dans des conditions financières acceptables. J’ai fait mes comptes et finalement décidé de partir de l’entreprise, sans projet particulier, vers un inconnu que je suis convaincu d’apprivoiser en quelques semaines ou, au pire, quelques mois.
     
    Depuis mon départ physique de l’entreprise, trois mois plus tôt, j’ai exploré plusieurs pistes de reconversion qui se sont toutes terminées en impasse. La première m’a été procurée par la rencontre improbable d’un ancien collègue perdu de vue depuis 10 ans et devenu chef d’entreprise. Il entrait dans un restaurant lyonnais où j’étais en train de faire connaissance pour la première fois avec un « tablier de sapeur ». Lorsque j’ai évoqué ma situation, il m’a aussitôt proposé une mission dans un domaine que j’affectionne (la remise en ordre d’un système d’information). Mes premiers pas de consultant m’ont très vite fait ressentir que je ne voulais plus remettre les pieds dans un lieu que j’avais décidé de quitter : l’entreprise broyeuse et anxiogène qui veut colmater des plaies béantes avec du sparadrap.
     
    J’ai étudié d’autres pistes qui demandaient une formation diplômante : gestionnaire de patrimoine, naturopathe, conseiller en prévention des risques psychosociaux… Mais à 54 ans, je n’ai pas eu la force de reprendre des études.
     
    Dans ma recherche, je suis accompagné par une société dont la mission est de m’aider à définir un projet. Après une demi-douzaine de pistes explorées sans succès, je suis une fois encore revenu au point de départ. Je vis cette situation avec difficulté. Mes envies sont éteintes, mon avenir est inexistant. Je ne suis pas dos au mur ; je suis face à lui, incapable de me projeter.
     
    Je me replonge dans mon dossier de licenciement pour voir où j’en suis concernant mes Droits Individuels Formation (DIF). Accumulés au cours de mes années de travail, ces droits me permettent de mettre en œuvre un projet de formation. STUPEUR ! Je constate que j’ai jusqu’à la fin de mon préavis, c’est à dire demain, pour les faire valoir en présentant un dossier recevable à mon entreprise, faute de quoi ces droits seront perdus.
     
    Au milieu du marasme et de mon manque d’envie je dois absolument trouver une formation motivante pour moi et acceptable par l’entreprise : apprendre un langage de programmation ou comment construire un site internet ? Je cherche, trouve, lis et me désespère. Si j’avais été motivé par ces sujets, je les aurais explorés depuis longtemps…
     
    Soudain une étincelle : et si j’apprenais à peindre ? Deux ans plus tôt, en 2008, j’avais été époustouflé par une exposition des peintures réalisées par les élèves du cours subventionné par le Comité d’Entreprise. « Les barques » de Van Gogh côtoyaient « La jeune fille à la perle » de Vermeer et « La pie » de Monet.
     
    J’avais intégré cet atelier de deux heures hebdomadaires se tenant dans une salle de réunion où nous étions 6 ou 7 à tenter de reproduire des toiles de maîtres. Chacun à notre rythme, nous étions accompagnés par un artiste passionné qui, avant de jeter ses élèves dans le grand bain de la copie, leur faisaient travailler les ombres à partir du dessin d’une pomme.
     
    Barbouillage galactique 1Il m’avait fait acheter quelques tubes de peinture à l’huile et m’avait fait « patouiller » avec une spatule à partir de noisettes de couleurs posées sur une feuille de papier à dessin noir. Les gestes que j’avais faits faisaient se mélanger les couleurs pour en créer de nouvelles avec des dégradés que je trouvais superbes. J’avais été marqué par cette expérience et étonné de l’émotion positive qu’elle avait provoquée.
     
    Pour moi, ce n’était pas ça, peindre. Il ne s’agissait que d’un exercice qui me permettrait, je l’espérais, d’atteindre le Graal : copier les maîtres pour disposer, à la maison, de chefs-d’œuvres que je pourrais admirer et montrer à loisirs, fier de pouvoir dire « c’est moi qui l’ai fait ! ». C’était un défi dont je me sentais incapable pour l’heure. Mais n’est-ce pas cela l’essence du défi ?
     

    "Barbouillage galactique" ou l'art du patouillage

     
    Armand roulin copie
     
     
     
     
     
    Dans les semaines qui ont suivi, j’ai copié une première toile (« Portrait d’Armand Roulin » (Le fils du facteur) de Van Gogh). La copie était approximative mais j’étais fier du résultat auquel j’étais parvenu.

     

     

     
     
     
    "Portrait d'Armand Roulin" - Huile sur toile - 61x50 - d'après Van Gogh
     
     
     
     
     
    Persistance de la memoire copie
     
     
     
    La seconde fut « Persistance de la mémoire » de Dali, demandée par mon fils. Je suivais avec application les indications du professeur, tel l’apprenti cycliste qui dispose de roulettes stabilisatrices.
     
     
     
     
    "Persistance de la mémoire" - Huile sur toile - d'après Dali
     
     
     
     
     
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    Lorsque j’ai commencé la troisième (« La liseuse » de Fragonard, commandée par mon épouse), les cours se sont arrêtés, le Comité d’Entreprise ne souhaitant plus subventionner une activité jugée trop élitiste compte tenu du faible nombre de personnes bénéficiaires.
     
    Je me suis retrouvé avec ma « Liseuse » à peine commencée, incapable de poursuivre seul la réalisation de ma copie. L’envie d’y parvenir me torturait mais j’avais trop peur d’abîmer ce qui avait déjà été fait. J’ai mis mon rêve sous un oreiller, préférant les regrets de ne pas poursuivre aux remords d’avoir gâché.
     
     
    "La liseuse" en friche, d'après Fragonard
     
     
     
    Mais revenons-en à ce 30 août et à l’étincelle qui vient d’apparaître dans le néant lugubre de l’avenir tel que je le vois. Et si j’utilisais mon DIF pour apprendre à peindre ? Il est 14h et je me sens comme un mineur au fond de sa galerie. Il sait qu’un filon se trouve à proximité et sent en même temps l’imminence d’un coup de grisou. Il faut faire vite. La dernière possibilité pour présenter mon dossier est demain matin. J’ai l’après-midi pour trouver comment et où apprendre à peindre. Avec concentration et détermination, je cherche sur internet des ateliers d’arts plastiques susceptibles de m’accueillir.
     
    Les premiers ateliers contactés ne savent pas ce qu’est un dossier DIF dont les contraintes administratives demandent une certaine organisation. J’étends donc la recherche et trouve l’Atelier de la Salamandre, à Chelles, qui est administrativement au point pour monter un dossier DIF. Par chance, Delphine, sa propriétaire et animatrice, reprend aujourd’hui et peut me communiquer dans les deux heures une proposition pour cent heures de formation à la découverte des techniques d’arts plastiques.
     
    Je contacte la conseillère chargée de m’accompagner dans mon reclassement et de présenter mon dossier DIF. Elle est enthousiaste et le portera demain à mon entreprise. Ouf ! Pour la première fois depuis mon départ, j’envisage un projet avec légèreté. Je suis optimiste sur la validation de mon projet. Le lendemain, mon dossier est accepté et je prendrai mon premier cours dans deux jours. L’aventure artistique commence.
     

  • Défi d'artiste - L'expo

    Defi d artistes hesitations

    Défi d'artistes : Hésitations - Acrylique sur toile - 100x50 - 2017

    Nos 3 jours de création furent immédiatement suivis de 3 jours d'exposition présentant les œuvres produites les trois premiers jours.

    Exposer à 7 dans un espace investi en général par 2 ou 3 artistes est un exercice délicat. Chacun doit trouver sa place sans qu'un autre y trouve à redire. Dans cet exercice potentiellement périlleux, Olivier, maître des lieux et grand ordonnateur de l'évènement, est garant de l'harmonie de son déroulement. Il est indispensable que chaque artiste se sente traité équitablement. Pour autant, il ne s'agit pas pour un artiste de s'effacer au profit d'un autre sous prétexte d'équité, que ce soit par gentillesse ou par faiblesse. Il ne doit pas penser "ensemble" ni accepter d'emblée un emplacement qui ne lui convient pas sous prétexte de ne "pas faire de vagues".

    L'équilibre fut rendu possible par la rigueur bienveillante d'Olivier et la volonté de chaque artiste de parvenir dans un temps imparti à un résultat acceptable pour tous. Chacun a ainsi trouvé son espace. Le style de chaque artiste est particulier mais le choix des créations et leur accrochage donnaient une réjouissante impression de fluidité au regard.

    Une expo n'est pas une simple collection d'œuvres exposées au public. Il doit s'en dégager quelque chose en tout moment et tout lieu : de l'extérieur, à l'entrée de la galerie et quelque soit l'endroit où l'on s'y trouve. La première erreur est de surcharger l'espace. Les œuvres s'étouffent alors les unes les autres. Il se dégage d'une toile ou d'une sculpture une force, une puissance relative qui la rend fréquentable ou non par d'autres créations. À ne pas recpecter la bonne distance, on crée une cacophonie visuelle ou sensorielle qui ne doit exister que si elle est un parti pris, une volonté de l'exposant.

    Cette expérience collective restera pour moi une référence pour l'avenir. J'en retiendrai aussi qu'une exposition est vivante et que le public peut la faire évoluer. Ce fut le cas en ce qui me concerne. Des toiles rectangulaires présentées verticalement se sont retrouvées à l'horizontale pendant qu'une autre est devenue verticale. Ce changement de format a impliqué qu'une des toiles exposées a été retirée.

    La relation au public a été à l'image de cette manifestation : harmonieuse, joyeuse, fluide et parfois empreinte de ces émotions qui restent pour toujours gravées dans la mémoire tant elles sont fortes. Des expositions personnelles ou collectives que j'ai réalisées à ce jour, celle de "Défi d'artistes" est celle qui m'aura fait le plus progresser en tant qu'exposant. Elle m'aura permis de fixer des repères qui éclaireront mes choix pour les expositions à venir.

  • Défi d’artistes – J3 : Synthèse

    Les murs rien

    Défi d'artistes - "Les murs rien" - Acrylique sur toile - 90x90 - 2017

    J'ai du mal à parler de J3. Pourtant ce fut la journée la plus tranquille des trois, ou devrais-je dire la moins chaotique.

    C'est probablement dû à l'intensité avec laquelle j'ai vécu les 2 premières journées de "Défi d'artistes". En passant du plus haut au plus bas et en ayant, comme je l'ai eue, la possibilité d'observer mes réactions et mes émotions, la suite est médiane, mitoyenne, moins extrême en tous cas que ce qui a déjà été vécu.

    Pour résumer, j'associerais J1 à la découverte (je fais le tour du problème, comment je commence), suivie de la confiance (j'ai compris comment procéder et j'arrive à lâcher prise), puis d'une certaine lassitude (j'ai besoin de récupérer).

    Derrière J2, je mettrais la stupeur (ça ne se passe pas comme prévu), suivie du rejet (je ne me sens pas bien ici, la collectivité me pèse, j'ai envie de fuir) pour terminer par la résignation (j'ai choisi d'être là, j'assume d'y rester).

    J3 me donne une impression de synthèse. J'ai la sensation de vivre J1 et J2 avec moins d'émotion, et même un certain détachement. La collectivité n'est plus un problème : j'arrive à m'isoler. Je n'ai pas envie de peindre ? Ce n'est pas un problème : je sors, je lis, j'écris. Je devrais profiter de tout ce matériel disponible pour permettre l'émergence de la création ? Rien de plus simple ! Il suffit de s'y mettre.

    J'aurais voulu faire une toile d'un mètre sur 40cm, mais il n'y a plus de châssis de cette dimension. Même pas grave ! J'aurais voulu du blanc pour faire mon fond, mais les tubes de blanc sont vides. Et alors ? La création s'invitera à partir de ce qui est disponible : ce sera donc un carré de 90cm de côté et je prendrai de la couleur chair au lieu du blanc. "Les murs rien" émerge de ces manques et c'est très bien comme ça. L'œuvre n'est ni bonne, ni mauvaise. C'est elle qui devait être produite à cet instant avec ces moyens. Elle sera la seule de cette troisième journée.

    Celle-ci se termine par une grande opération de nettoyage. Demain, vendredi, nous faisons l'accrochage.

  • Défi d’artistes – J2 : Je me débats, fatigué

     

    Defi d artistes echo 2

    Défi d'artistes - Echo 2 - Acrylique sur toile - 100x40 - 2017

    J’arrive ce matin dans la lignée (aligné ?) de là où j’en étais hier soir. J’avais su gérer les moments d’adversité ; je devrais savoir le faire aujourd’hui.

    Je retrouve les réflexes de ma « vie d’avant » en identifiant ce qui me paraît urgent et important, en l’occurrence élaborer une réponse au défi du public qui est de « faire l’esquisse du projet artistique le plus fou que vous puissiez imaginer ». Comme la veille, je commence ma journée par ce point de repère en guise d’échauffement.

    Je poursuis l’idée trouvée hier mais plus j’avance, plus ça devient complexe. Dans mon projet, je fais interagir les gens, la technologie, la géographie, les couleurs et le mouvement. Comme hier cette complexité devient plus lourde que stimulante mais bon… je n’ai pas d’autre piste. Je suis dans le marécage, je ne peux rien faire d’autre qu’avancer. Au bout d’une heure, arrivé à saturation, j’arrête le travail pour passer à autre chose.

    Je construis un nouveau châssis rectangulaire pour travailler sur une nouvelle toile. Lors de récentes expositions, plusieurs spectateurs m’ont dit que mes gestes colorés les réconciliaient avec les fonds sombres. Je décide de prendre cette direction pour commencer ma toile. Pour la première fois depuis 4 ans, j’abandonne les couleurs primaires pour choisir un pourpre déjà fait. Je dois être dans une bonne énergie car le résultat me convient. J’enchaîne en préparant une seconde toile et là, tout bascule.

    Alors que j’étais dans ma barque, plutôt tranquille, voguant sur l’océan de la création, je ne m’étais pas rendu compte que mon embarcation prenait l’eau. Je sens que ça penche, j’essaye de rétablir l’équilibre. Mes gestes sur la toile deviennent hasardeux, plus secs, plus courts. La belle énergie dont je parlais plus tôt n’est même plus un souvenir. Je me débats pour ne pas passer par-dessus bord. Avec l’énergie du désespoir, je sens que je surcharge ma toile de gestes et de couleurs. Arrivé à saturation, je déclare ma toile terminée avant de plonger.

    Bon sang, que l’eau est froide !! Comme hier, je sens que « plus rien ne vient ». Mais autant hier je ne m’affolais pas, résolu à laisser passer l’orage, autant là, maintenant, je sens que la panique vient s’ajouter au désespoir. Je ne sais pas na-geeerrr ! J’ai envie d’appeler à l’aide mais je me ravise dans un instant de lucidité. De quoi ai-je peur ? Qu’est-ce qui me pose problème ? Rien n’est grave. Je suis juste dans une situation inconfortable et de plus, je l’ai cherchée. Cette sensation me ramène 5 années en arrière, le jour de ma découverte de l’art abstrait. J'avais alors vécu un moment d'anxiété profonde.

    Je décide de m’aérer. Je me balade dans le quartier (Bonne Nouvelle, Grands Boulevard, y’a pire !), flâne dans une librairie, reviens à la Galerie, prend mon ordinateur et rédige mon article de blog sur « Défi d’artistes – J1 ». En fin de journée, nous débriefons avec Olivier et nos « témoins », qui sont des personnes de notre entourage qui ont accepté d’endosser le rôle du public pour nous aider à présenter notre défi.

    La panique est retombée. J’ai de la compassion pour l’enfant que j’étais aujourd’hui, qui se débattait dans ce qu’il croyait être l’océan et qui n’était qu’une pataugeoire. Je me sens profondément humain, c’est-à-dire fragile, sensible, mais avec une force qui me tient debout. La fatigue est là. Le soir, une fois rentré à la maison, je prends ma tension : 10 / 6. Je ne l’avais jamais vue aussi basse. Une nuit d’un sommeil court mais réparateur devrait me remettre d’aplomb.

     

    Si vous le pouvez, venez demain vendredi 17 février au vernissage, à partir de 18h30, ou samedi 18 / dimanche 19 février de 14h à 19h au « Laboratoire d’exposition », 13 rue de l’Échiquier – 75010 Paris.

    Le public est un élément essentiel de la création artistique par le regard qu’il propose à l’artiste sur son œuvre. Chaque regard est une naissance avec tout ce qu’elle apporte de joie et de partage.

  • Défi d'artistes - J1 : aligné !

    Defi d artistes echo 1

    Defi d'artistes - Echo 1 - 100x40 - 2017

    Je me suis préparé à ne rien espérer, ne rien attendre.

    Nous sommes 7 artistes, tous à des stades différents, avec des histoires différentes. Plusieurs ont une expérience artistique de longue date, certains ont une formation d’architecte, les âges vont du simple au double. Nous passons une bonne heure à nous présenter, citer notre défi, évoquer notre état d’esprit.

    Pour ma part, j’ai l’impression d’être « au milieu ». Je n’ai ni excitation ni inquiétude, ni envie ni rejet. Je me dis que c’est la quiétude mais je me méfie de cette pensée. Je me sens curieux, dans l’observation de ce qui se passe et de mon état intérieur. Le projet choisi par le public est « faire l’esquisse du projet artistique le plus fou que vous puissiez imaginer ». Ça n’a l’air d’enchanter personne mais nous devons nous y soumettre.

    Comme je m’y attendais, je n’ai ni envie, ni besoin de peindre. La tension que j’ai identifiée comme nécessaire n’existe pas. En tous cas pas encore. C’est par le travail sur le défi du public que je décide de commencer cette première matinée. J’ai besoin de repères et cette figue imposée m’en offre un. J’ai une idée que je couche sur le papier. Je commence à dessiner. Je travaille aux antipodes de mes habitudes. Je me retrouve comme 5 ans en arrière, à l’époque où je faisais des petits gestes avec mes petits pinceaux au bout de mes petits doigts. Après quelques dizaines de minutes, je n’y tiens plus. J’ai envie de tout envoyer balader en faisant de grands gestes. Ma soif d’amplitude vient à bout de mon application à travailler sur ce défi. Je me trouve laborieux. Je range tout. Je reprendrai demain.

    Commence alors pour moi une période pas vraiment agréable. À la maison, j’aurais mis un peu de musique, j’aurais flâné sur internet, j’aurais commencé l’écriture d’un article ou répondu à des mails… Mais là, je n’ai rien de tout cela. Je suis debout, les mains dans les poches, le regard dans le vide, ressassant que « rien ne vient ». Je déambule au milieu des pots de peinture, des châssis à construire et de tout le matériel nécessaire pour construire un œuvre. Il y en a partout mais… « rien ne vient » !

    J’ai appris à gérer ces moments. Je ne me dis même pas « patience, Denis ; ça va venir… ». Je suis venu ici me mettre volontairement dans une situation inconfortable et je suis en plein dedans. Je n’avais plus ressenti cette sensation depuis des années. C’est fou comme une pensée négative peut être sclérosante, lénifiante, étouffante. Et pourtant, je n’ai d’autre choix que de l’accepter. Lutter contre ne la fera pas disparaître. Au contraire ! Je me rends compte que lutter renforce la présence adverse.

    Après plusieurs dizaines de minutes à ressasser, le temps est venu d’accepter et de passer à autre chose. Il y a tout ce matériel qui m’entoure : du papier, de la toile, des châssis, de l’acrylique, de l’aquarelle, de l’encre de chine, des crayons de couleurs, des craies, des pastels, des compas, règles et rapporteurs, des pinceaux, des couteaux, des rouleaux, des punaises, un marteau, des tables des chaises, des cimaises et j’en oublie. J’ai tout à coup envie de faire quelque chose de tout cette profusion. Ce serait dommage de ne pas en profiter. La tension disparaît et je choisis de construire un châssis rectangulaire, format sur lequel j’ai toujours eu des difficultés à faire mes « gestes colorés ». Cette activité artisanale me remet d’aplomb. Je retrouve le plaisir que j’avais, enfant, à construire des maisons en Lego ou à emboîter des morceaux de bois pour construire une cabane.

    Tout se passe ensuite très vite. Le châssis appelle la matière colorée qui, elle-même, appelle le geste. La place est à l’action et à… l’étonnement. C’est un indice : la création est dans les parages. Une toile vient puis deux autres dans l’après-midi. Je me sens au bon endroit, à faire ce pourquoi je suis là, tranquillement. J’ai l’impression d’avoir contourné les obstacles par ma persévérance, sans avoir dû lutter. Je sors content de cette première journée. Je me sens « aligné ».

  • Défi d'artiste

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    Le 14 février est pour moi un jour spécial. C'est le jour qui me donne une année de plus... bref, c'est mon anniversaire. Eh, oui, je suis né le jour de la Saint Valentin et j'ai le bonheur de célébrer depuis de nombreuses années.

    À tous ceux qui disent que c'est une chance d'être né ce jour-là, je réponds que je ne pense pas que ma vie amoureuse eut été sensiblement différente si j'étais né le 13 ou le 15 février. C'était juste ce jour-là, et ma maman m'a dit que le médecin qui l'avait accouchée n'avait peut-être pas gardé un bon souvenir de ce jour de l'hiver... 1956 : les -25°C qu'il faisait en Isère ce matin-là avaient eu raison de la batterie de sa voiture.

    61 ans plus tard, ce 14 février sera aussi le 1er jour de mon "Défi d'artiste". Cet évènement nous verra, avec 6 autres artistes, ouvrir une fenêtre temporelle de 3 jours dans un espace d'exposition (le "Labo") pour créer. Ce qui aura émergé de cette séquence créative sera exposé dans ce même "Labo" du vendredi 17 février 18h30 (vernissage) au dimanche 19 février 19h .

    Du 14 au 17, donc, chacun des artistes tentera de relever un défi qu'il s'est lui-même fixé. En ce qui me concerne, le fait de définir une date, une durée et un lieu que je vais consacrer à la création va à l'encontre de la façon dont je conçois jusqu'ici l'acte créatif. Depuis un certain temps, je ne décide pas quand je vais peindre. Cela s'impose à moi comme une évidence, au lever, à minuit ou en plein après-midi, assis dans le métro, sur mon vélo ou sur mon canapé, je sens que "c'est maintenant". Le temps de me mettre à l'ouvrage, parfois l'énergie est toujours là, parfois elle s'est évaporée sans que je comprenne ni comment ni pourquoi. Et puis je sens le besoin d'être seul. Je ne pense pas que ce soit une question de pudeur mais plutôt de concentration, car il m'est arrivé souvent de peindre ou dessiner sur le motif, dans Paris, sans être gêné par le regard du public.

    Pour résumer, je vais me mettre le 14 février dans une situation inhabituelle à plus d'un titre : le moment et la durée sont choisis, le lieu est défini et nous serons 7 artistes à évoluer ensemble. Que sortira-t-il du travail individuel de chacun, qui vient avec son propre défi ? Y aura-t-il une influence du groupe sur le travail personnel ?

    Notre intégration au processus créatif individuel ou collectif sera présentée au public à l'issue de ces 3 jours, pendant 3 autres jours, d'exposition cette fois-ci, et qui seront l'occasion de nouveaux défis, entre artistes et public. Ce sera amusant, inattendu et destiné à nous faire grandir ensemble autour du processus de création.

    Je plonge vers cet inconnu sans attente (la création ne peut faire l'objet d'aucune attente puisqu'elle n'existe pas encore) et sans espoir, si ce n'est celui d'avoir suscité la curiosité de mes contacts et touché mon public. Le tout sera sera conduit par Olivier Wahl, dont les habitués du "Labo" connaissent les talents d'animateur pour rendre un évènement vivant et marquant, pour le public comme pour les artistes.

    J'espère donc vous croiser lors de cet évènement original et unique.